Découverte d’un nouveau gène responsable de syndromes provoquant des anévrismes de l’aorte

Plusieurs équipes dans huit pays, notamment de l’Institut des maladies génétiques Imagine à Paris (Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP/Inserm/Université de Paris), de l’unité de recherche Inserm-CNRS Mitovasc (CHU d’Angers/Université d’Angers) ont identifié un nouveau gène responsable de dysplasies du tissu conjonctif, un groupe de pathologies qui touchent les vaisseaux, le squelette et la peau.

Publié le 18.06.2021

Accélérer la recherche

Plusieurs patients  présentent aussi des anomalies immunitaires et une inflammation intestinale. Suite à une collaboration internationale, les équipes ont mis en évidence une mutation du gène IPO8 ayant pour conséquence une forme sévère de cette pathologie. Cette avancée, si elle concerne une maladie rare, pourrait contribuer à une meilleure compréhension de pathologies vasculaires et immunitaires plus fréquentes.

Une nouvelle forme sévère de dysplasie conjonctive identifiée

Les dysplasies du tissu conjonctif telles que le syndrome de Marfan et les syndromes apparentés type syndromes de Loeys-Dietz et Shprintzen-Goldberg, touchent à des degrés variables les organes du corps constitués de tissu conjonctif comme les vaisseaux sanguins, le squelette, les tendons, la peau et les yeux.  La complication la plus redoutable est la survenue d’anévrismes de l’aorte qui mettent en jeu le pronostic vital.

Les équipes ont identifié douze patients présentant une maladie jusque-là non identifiée, combinant une atteinte cardiovasculaire, une hyperlaxité articulaire, et une dérégulation du système immunitaire. Les patients ont tous en commun une mutation du gène IPO8, alors identifiée comme responsable de cette forme sévère de dysplasie. Les chercheurs et généticiens ont montré que cette mutation perturbe la voie de signalisation du TGF-Bêta, une voie essentielle pour le développement et la fonction des cellules du tissu conjonctif et pour la régulation du système immunitaire, expliquant ce tableau clinique.

Collaborer au niveau international pour accélérer les découvertes

Si cette avancée a été possible, c’est grâce à une collaboration internationale et multidisciplinaire regroupant plus de quarante chercheurs dans huit pays à travers le monde. Chaque groupe, avec ses expertises, ses patients et ses expériences, a permis de mettre les forces en commun, de faire une science interactive, et ainsi d’aller plus vite, au bénéfice des patients et de la science  

Dr Nadine Cerf-Bensussan, Directrice du laboratoire d’Immunité intestinale à Imagine

Depuis 2016, plusieurs patients présentant un tableau clinique similaire non diagnostiqué ont été identifiés à l’Institut Imagine et au CHU d’Angers. En séquençant leur génome, les équipes ont mis en évidence la mutation d’IPO8. D’autres patients ont ensuite été identifiés grâce à des bases de données nationales et internationales comme Gene Matcher, portant le nombre total à douze.

A partir de là, les équipes, et notamment Alban Ziegler et Rémi Duclaux-Loras, ont continué à collaborer pour décrire et caractériser ces patients. En parallèle, grâce à l’expertise de Filippo Del Bene et Céline Revenu à l’Institut de la Vision, un modèle d’étude animal, le poisson zèbre, a été mis au point afin de reproduire la mutation génétique et d’observer les anomalies retrouvées chez les patients. Un travail parallèle mené dans l’équipe de Bart Loeys (Université d’Anvers, Belgique) spécialiste de la voie TGF-Bêta, confirme l’implication du gène IPO8 dans les maladies du tissu conjonctif responsables d’anévrismes de l’aorte.

Ouvrir la voie à de nouvelles recherches

Cette découverte, si elle ne permet pas à ce jour de guérir les personnes qui en sont touchées, est une première étape vers de nouvelles recherches. « On est toujours dans le brouillard concernant cette maladie, mais désormais les phares sont allumés dans la nuit et on peut avancer », fait remarquer le Pr Bonneau, généticien au CHU d’Angers. La découverte de ce nouveau gène confirme que la voie de signalisation TGF-Bêta est importante pour le développement de ces maladies et que ce gène, jusque-là non connu dans cette voie, a probablement un rôle important à étudier en détails. La prochaine étape sera de mieux comprendre les anomalies immunitaires chez ces patients et d’essayer de corriger la maladie chez le poisson-zèbre.

Plus généralement, cette découverte d’une forme rare de maladie des tissus conjonctifs pourrait participer à une meilleure compréhension de pathologies plus fréquentes et notamment vasculaires telles que l’anévrisme de l’aorte qui concerne plus de 10 000 personnes par an en France (anévrismes de l’aorte abdominale et thoracique). 

Travailler sur une maladie rare sert les maladies plus courantes comme la survenue des anévrismes aortiques. Ce nouveau gène est une pièce du puzzle des pathologies vasculaires. En s’ajoutant aux facteurs environnementaux déjà connus, ce facteur génétique pourrait permettre de mieux comprendre pourquoi certaines personnes sont plus touchées que d’autres par des maladies vasculaires  

Pr Dominique Bonneau, Généticien au CHU d’Angers