Le syndrome COPA : une nouvelle interféronopathie

Le syndrome COPA est une maladie auto-inflammatoire rare identifiée pour la première fois en 2015. Il est dû à une mutation dans le gène COPA, dont les chercheurs d’Imagine viennent de montrer le rôle dans l’induction des interférons de type 1, une des premières lignes de défense de notre organisme contre les infections virales.

Publié le 17.08.2020

Accélérer la recherche

Depuis sa découverte en 2015, seules 60 personnes ont été diagnostiquées pour le syndrome COPA. Les patients atteints de cette pathologie a priori très rare présentent des symptômes variés qui touchent en particulier les poumons, les reins et les articulations. Elle peut même être asymptomatique. L’exploration de cette maladie génétique a récemment mis en évidence un niveau accru d’interféron de type 1 (IFN-1). Ces protéines commencent à être produites dans les minutes qui suivent l’infection par un virus dans nos cellules et transmettent le message de l’agression à travers tout l’organisme. Cette réponse immunitaire rapide et immédiate se produit quel que soit le virus.

Marie-Louise Fremond et Alice Lepelley

Le risque d’un excès d’interférons 

Cependant, bien qu’essentiels, les interférons produits en trop grande quantité deviennent toxiques. En immunité tout est en effet question d’équilibre : une réponse exacerbée n’est pas sans risque : « Une suractivation d’IFN-1 cause des interféronopathies de type 1, des maladies génétiques rares qui touchent probablement moins d’un millier de personnes dans le monde. Ces maladies généralement très sévères peuvent affecter simultanément divers organes, en particulier le cerveau, les poumons et la peau, explique Marie-Louise Frémond, futur pédiatre à l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP et post-doctorante dans le laboratoire de neurogénétique et neuroinflammation dirigé par Yanick Crow à l’Institut Imagine.

Syndrome de COPA et SAVI : de nombreux points communs

Parmi les interféronopathies de type 1, les symptômes observés dans l’une d’entre-elles, la vasculopathie de l'enfant associée à STING communément appelée SAVI (pour STING-associated vasculopathy with onset in infancy), n’étaient pas sans rappeler le syndrome COPA. Le SAVI est une maladie génétique auto-inflammatoire causée par l'activation constitutive de la protéine STING (pour Stimulateur des Gènes de l'Interféron). Les patients souffrent d'une inflammation systémique et d'une vasculopathie touchant les petits vaisseaux, entraînant des lésions cutanées, pulmonaires et articulaires sévères.

« La protéine STING intervient dans le mécanisme de reconnaissance de l’ADN dans le cytosol, la phase liquide dans laquelle baignent les organites cellulaires et dans laquelle aucun ADN ne doit censément être présent, décrit Alice Lepelley, post-doctorante dans la même équipe. La présence de ce fragment d’ADN agit alors comme un signal de la présence d’une infection virale, car le virus après avoir infecté une cellule libère dans le cytosol des fragments d’ADN. Quand ils sont repérés, la protéine STING est activée puis se dirige au niveau d’un compartiment de la cellule, l’appareil de Golgi pour induire la production d’IFN-1. »

Alors les chercheuses ont voulu savoir si la protéine COPA – qui a donné son nom au syndrome COPA en raison de son altération- entrait en jeu dans ce processus. Elles ont donc regardé ce qui se passait dans des cellules et d’autres modèles lorsqu’on active ou désactive ou COPA et STING ensemble, ou séparément...

« Lorsque la protéine COPA est mutée, on constate une accumulation de STING au niveau de l’appareil de Golgi, ce qui nous a conduit à émettre l'hypothèse que COPA a un rôle dans le trafic de STING vers et au départ du Golgi, » explique Marie-Louise Frémond. Chez les patients atteints de SAVI, en raison d’une mutation de STING, la protéine s’accumule spontanément au niveau du Golgi en dehors de toute infection et induit une production continue d’IFN-1. Dans le syndrome COPA, c’est la mutation de COPA qui empêcherait le retrait de STING une fois que celle-ci est présente au niveau du Golgi.

Sans COPA, l’activité de STING n’est pas régulée

« On savait que COPA faisait partie d’un complexe formant des vésicules qui transportent les protéines entre le réticulum endoplasmique où sont produit les protéines et l’appareil de Golgi où elles finissent d’être « préparées » en vue de leur fonction future, rappelle Alice Lepelley. Nos travaux laissent présager que les mutations de COPA nuisent au bon transport de STING, mais sans qu’un lien direct entre ces deux protéines existent. Il existe sûrement des intermédiaires que nous devons découvrir. »

D’ailleurs parallèlement, deux autres études confirment que l’induction de IFN-1 induite par la protéine COPA mutée dépend de STING et identifient un partenaire possible entre STING et COPA. « D’après nous, ce n’est pas le seul, » enchaîne Marie-Louise Frémond. Il s’agit donc de poursuivre les recherches pour mieux comprendre ce mécanisme qui fait déjà figure de cible thérapeutique potentielle pour réduire l’excès nuisible d’IFN-1.

La jeune pédiatre poursuit donc le recrutement de patients atteins du syndrome de COPA pour accroître la cohorte qu’elle étudie actuellement et qui est composée de 11 patients, ce qui compte-tenu de la rareté de la pathologie n’est pas simple et nécessite de mobiliser un réseau notamment de pneumologues pédiatriques. « Il est fort probable que certains patients suivis dans ces services et dans d’autres y compris en médecine d’adulte n’aient pas été identifiés à ce jour comme porteur d’une mutation de COPA. » C’est là l’une des grandes difficultés associées à l’étude des maladies rares.