Prédisposition génétique au syndrome d’Evans : Vers un meilleur diagnostic et des thérapies ciblées

Le syndrome d’Evans est une maladie auto-immune rare dont les premiers signes peuvent apparaître pendant l'enfance ou à l'âge adulte. Suite à un défaut de contrôle du système immunitaire, ce dernier s’attaque aux globules rouges, provoquant des anémies chroniques plus ou moins sévères, et aux plaquettes, perturbant la coagulation sanguine. L’origine de cette pathologie rare de l’enfant reste le plus souvent inconnue.

Publié le 02.04.2019

Accélérer la recherche

  • Immunologie

« Un faisceau de présomptions nous incitait à penser que les formes à début pédiatrique devaient être d’origine génétique », explique Frédéric Rieux-Laucat, directeur du laboratoire d'Immunogénétique des maladies auto-immunes pédiatriques (Inserm/université de Paris) à l’Institut Imagine. Mais seules quelques rares causes génétiques avaient été identifiées. Grâce à l’expertise d’Imagine dans ce domaine, nous avons pu explorer le génome de 80 patients atteints de ce syndrome. Mais c’est un peu comme rechercher une aiguille dans une botte de foin car il s’agit d’aller identifier, au cœur des cellules, dans les quelques 22 000 gènes connus et parmi les deux milliards de lettres qui composent l’ADN, une mutation présente dans un seul gène. Parfois, une simple lettre du fameux code génétique est modifiée. Ajouter à cela le fait que d’un individu à l’autre, ce patrimoine génétique est légèrement différent, et vous avez un aperçu de la tâche à accomplir pour identifier une cause génétique.

« Une autre difficulté, enchaîne le chercheur, consiste à disposer de suffisamment de prélèvements de patients pour réaliser les expériences qui vont démontrer la causalité de la mutation identifiée. Pour cela nous avons été épaulés par le centre de référence des maladies rares des cytopénies auto-immunes de l’enfant (CEREVANCE) à Bordeaux qui centralise les données cliniques au niveau national, ainsi que par le centre de référence des déficits immunitaires héréditaires (CEREDIH) à Necker. »

Equipe Frederic Rieux-Laucat
Discussion au sein de l'équipe de Frédéric Rieux-Laucat © Laurent Attias

Faire le lien entre clinique et génétique

Forte de toutes ces expertises, l’équipe de Frédéric Rieux-Laucat a pu mettre en évidence une origine génétique chez 65% des 80 patients ayant eu un test génétique. Pour 49 d’entre eux, la mutation était présente dans les cellules germinales – les spermatozoïdes et les ovocytes – et donc potentiellement transmissible à leur descendance.

« 32 de ces mutations n’ont pas été une réelle surprise pour nous, note Frédéric Rieux-Laucat. Elles affectent des gènes, 9 en l’occurrence, connus pour leur rôle dans des immunodéficiences primaires qui sont des maladies du système immunitaire avec une susceptibilité accrue à des infections. En revanche, les mutations identifiées chez 20 patients n’avaient jusqu’à présent jamais été référencées dans des maladies du système immunitaire. » Pour 35 % des patients, aucune cause génétique n’a toutefois pu être mise en évidence. Il s’agit en revanche des patients ayant les symptômes les moins sévères. Il est possible que des mutations « moins délétères » demeurent cachées dans les domaines encore non explorés du génome comme les introns ou qu’elles ne soient présentes que dans une proportion limitée des cellules du système immunitaire (mutations dites somatiques).

Ces recherches ouvrent plusieurs perspectives pour les patients. L’identification du gène défectueux est indispensable à la poursuite des recherches pour mieux comprendre la maladie. C’est le point de départ pour explorer les mécanismes cellulaires défectueux et pour tenter de les restaurer. Dans ce cas précis, l’existence de dénominateurs communs avec d’autres pathologies également explorées à Imagine, les immunodéficiences primaires, peuvent même être un accélérateur pour identifier de nouveaux traitements ou pour repositionner des thérapeutiques existantes. « Proposer des tests génétiques aux patients atteints de syndrome d’Evans pourrait alors permettre de mieux diagnostiquer la maladie et de déterminer les traitements les mieux adaptés en fonction du pronostic individuel, » conclut le chercheur.

Equipe Frederic Rieux-Laucat

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