Découverte d’une nouvelle maladie génétique prédisposant aux infections à mycobactéries

Le MSMD ou syndrome de prédisposition mendélienne aux infections mycobactériennes, est un groupe de maladies rares entrainant une susceptibilité aux infections sévères à des mycobactéries habituellement peu virulentes. À ce jour, 32 défauts génétiques dans 17 gènes, des erreurs innées de l’immunité liée à l’interféron gamma (IFN-γ), ont été identifiés comme pouvant être responsables de MSMD. Le groupe de Jacinta Bustamante, dans le laboratoire de Jean-Laurent Casanova, se consacre à la recherche et l’élucidation de ses causes génétiques et immunologiques. Aujourd’hui, l’équipe a découvert un nouveau défaut génétique à l’origine du MSMD : des mutations du gène ZNFX1, jusqu’alors mal connu et non identifié pour cette maladie.

Publié le 09.04.2021

Accélérer la recherche

Un point commun aux infections mycobactériennes sévères : les défauts génétiques liés à l’interféron gamma

Si les mycobactéries présentes dans notre environnement ou le vaccin vivant bacille de Calmette et Guérin (BCG) n’entraînent généralement pas de maladie, certaines personnes développent parfois des infections sévères pouvant aller jusqu’au décès.

Depuis 25 ans, le laboratoire du Pr Jean-Laurent Casanova et du Dr Laurent Abel, à l’Institut Imagine (Université de Paris/AP/Inserm) sur le site de l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, et à l’Université Rockefeller de New-York, s’intéresse à comprendre pourquoi des personnes exposées à un agent infectieux vont développer ou non des formes plus ou moins sévères.  

Au sein du laboratoire, le groupe du Dr Jacinta Bustamante étudie les défauts génétiques rendant inefficaces certains mécanismes immunitaires face aux infections mycobactériennes.

Au cours de ses travaux, le laboratoire a mis en évidence que ces réactions sévères aux infections mycobactériennes sont dues à une production insuffisante d'IFN-γ par les cellules lymphoïdes, et/ou une altération des réponses des cellules myéloïdes à cette cytokine.

À ce jour 32 défauts génétiques dans 17 gènes, ont tous pour point commun d’altérer la production et/ou la réponse à l'IFN-γ, un acteur clé de notre réponse immunitaire pour lutter contre ces infections. Très récemment, le laboratoire avait par exemple démontré le rôle du facteur de transcription T-bet (TBX21) dans la réponse immunitaire innée et les conséquences lorsqu’il est muté, et découvert la première mutation affectant le gène IFNG codant pour la cytokine clé de l’immunité antimycobactérienne. 

Une nouvelle maladie génétique et un nouveau gène identifiés

Tom Le Voyer, médecin interniste et étudiant en thèse de sciences dans le groupe de Jacinta Bustamante, a étudié quatre patients issus de deux familles non apparentées, dont les membres étaient atteints de maladie mycobactérienne, avec une infection par le BCG et une tuberculose disséminée (forme grave), et une élévation intermittente de leur nombre de monocytes. Aucun d’entre eux ne présentait d’erreur innée de l'IFN-γ connue jusqu’alors.

Des mutations du gène ZNFX1 ont été découvertes chez ces patients, avec pour conséquence un défaut d‘expression de la protéine ZNFX1, qui s’exprime dans les cellules myéloïdes appelées monocytes. L’équipe a aussi montré un lien entre la protéine et les granules ribonucléoprotéiques, appelés granules de stress, qui jouent un rôle dans la protection de l’organisme face au stress, la transcription de l’ARN messager et le bon déroulement de processus biologiques et immunitaires spécifiques.

Cette étude montre que la déficience héréditaire de la protéine ZNFX1 associée aux granules de stress joue un rôle important pour l'homéostasie des monocytes et pour l'immunité protectrice contre les mycobactéries. C’est une nouvelle étiologie génétique du MSMD et de la tuberculose associant une monocytose intermittente. L’équipe va continuer à développer ses recherches sur cette protéine, sa participation aux infections mycobactériennes, particulièrement la tuberculose, et son interaction avec l’ARN messager.

 

* Jacinta Bustamante* est Maître de conférence-Praticien hospitalier à l’Université de Paris, chercheuse dans l’équipe "Génétique humaine des maladies infectieuses : prédisposition monogénique" (Inserm/Institut Imagine) dirigée par Jean-Laurent Casanova et médecin biologiste au Centre d’Etude des Déficits Immunitaires (CEDI) – DMU Biologie médicale, Médecine génomique et Physiologie, à l’hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP Centre.

**Jean-Laurent Casanova est Professeur à l’Université de Paris/Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP Centre et à l’Université Rockefeller à New York, mais aussi directeur d’un laboratoire de recherche Inserm à l’Institut Imagine et au Howard Hughes Medical Institute à New-York.

***Laurent Abel est co-fondateur du Laboratoire de génétique humaine des maladies infectieuses, laboratoire international de l’Inserm organisé en deux branches, l’une au Rockefeller à New York et l’autre à l’Institut Imagine.