Matias Simons : de la génétique aux stratégies pour protéger le rein

Grâce au prestigieux financement de l’ERC, Matias Simons va explorer les mécanismes à l’origine des maladies rares du rein afin de mieux les comprendre et de les traiter.

Publié le 03.01.2020

Accélérer la recherche

A l’issue de ses études médecine à Heidelberg en Allemagne, Matias Simons a effectué une thèse sur la recherche sur les maladies rénales. C’est donc tout naturellement qu’ensuite, il s’est orienté vers la néphrologie. « J’ai réalisé combien il était difficile de mener de front médecine et recherche, explique-t-il. C’est pourquoi j’ai décidé de me consacrer entièrement à la recherche. Au cours de mon 1er post-doctorat, j’ai découvert le lien entre les maladies rénales kystiques et un mécanisme qui régule la polarité planaire des cellules dans les épithéliums. »

Matias Simons laboratoire
© Laurent Attias

Les mutations d’une protéine appelée Inversin provoquent une néphronophtise de type II, une maladie rénale autosomique récessive qui se caractérise par le développement de fibrose kystique, un situs inversus, et une insuffisance rénale. Or, Matias Simons a démontré que l’inversin agit comme un interrupteur moléculaire entre différentes cascades de signalisations centrées sur Wnt au sein des cellules. Au cours d’un 2e post-doc, il s’est penché plus en détail sur la polarité planaire dans les cellules en utilisant comme modèle la drosophile, cette mouche très appréciée par les biologistes.

Imagine : réunir science et maladie génétique

C’est en 2013 qu’il entend parler pour la première fois de la création d’un tout nouvel institut à Paris dédié aux maladies génétiques, Imagine. « L’opportunité m’était enfin offerte de recentrer mon travail sur les maladies génétiques, souligne-t-il. L’institut était au cœur du campus Necker, un endroit connu mondialement pour son expertise sur les maladies pédiatriques. Imagine regroupait par ailleurs dans un même lieu des spécialistes de différents organes – reins, os, cerveau… - étudiant les maladies génétiques. Les conditions étaient réunies pour en faire un endroit des plus attractifs. »

Alors que l’étude de la drosophile permet à Matias Simons de valider les fonctions de gènes candidats dans divers mécanismes, il entame parallèlement une collaboration avec le Pr Corinne Antignac, médecin et chercheuse spécialisée dans les pathologies rénales rares à l’Institut Imagine. Il est ainsi amené à prendre part aux activités diagnostiques et à identifier des patients porteurs d’une mutation dans le gène cubilin (ou CUBN) qui altère les protéines présentes dans les urines. Cette pathologie nommée protéinurie est souvent associée à un mauvais pronostic pour le rein. Or dans ce cas précis, la protéinurie ne se traduit par aucun dysfonctionnement ou pathologie des reins, ce qui fut une totale surprise pour les chercheurs. Par ailleurs en étudiant de plus grandes cohortes de patients, ils ont même montré que certains variants – des petits écarts avec la séquence de référence du gène – étaient associés à une meilleure fonction rénale chez des personnes atteintes de maladie chronique du rein. En conséquence, l’inhibition de la cubilin en entravant l'absorption des protéines dans les tubules proximaux du néphron pourrait être à l’origine d’une nouvelle une stratégie néphroprotectrice. « Mon idée est que les variants de la cubulin ont persisté au cours de l’évolution pour protéger les reins, » décrit Matias Simons. Le financement de l’ERC va lui permettre d’explorer cette piste. Et si prochainement, il va quitter l’Institut Imagine pour diffuser l’esprit Imagine à l’université d’Heidelberg en Allemagne, il envisage de poursuivre ses collaborations fructueuses avec les médecins et les chercheurs de l’Institut des maladies génétiques.

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