Mickaël Ménager

Réponses inflammatoires et réseaux transcriptomiques dans les maladies

Publié le 18.11.2019

Présentation

Réponses inflammatoires et réseaux transcriptomiques dans les maladies

 

Projet 1 : L’approche Single-Cell pour mieux caractériser les maladies auto-inflammatoires 

 Dans notre laboratoire, nous proposons de combiner des approches de pointe d’analyse transcriptomique de cellule unique et d'accessibilité de la chromatine avec des outils puissants de biologie computationnelle, et notamment une toute nouvelle technologie extrêmement fiable pour explorer la complexité de la réponse immunitaire innée et de l'auto-inflammation. Nous envisageons de recourir au système en pleine émergence d’Inférence des réseaux de régulation transcriptionnelle pour obtenir une compréhension plus précise et fiable de la diversité des mécanismes moléculaires à l'origine des maladies auto-inflammatoires.

L'analyse fine et la caractérisation détaillée des réseaux de régulation contrôlant l'inflammation constitueront un grand pas en avant pour remplacer les traitements immunosuppresseurs coûteux et administré à vie par des thérapies plus précises, avec, espérons-le, moins d'effets secondaires. Elle devrait fournir au domaine de la biologie moléculaire une carte pondérée des interactions potentielles qui pourra être utilisée pour sélectionner précisément et hiérarchiser les facteurs permettant de caractériser et de déchiffrer davantage la complexité d'un processus particulier, dans notre cas la dysrégulation de l'inflammation. Afin de rendre les maladies auto-inflammatoires susceptibles de faire l'objet d’Inférence des réseaux, nous proposons de réaliser des expériences de séquençage d'ARN au niveau d'une seule cellule, où le transcriptome de deux cellules différentes est suffisamment distincts pour que chaque cellule analysée puisse désormais être considérée comme un échantillon individuel.

 

Principaux objectifs

  • Nous nous intéressons à l'étude des changements transcriptomiques conduisant à un excès de production d'IFN dans les pathologies. SAMHD1, présente un intérêt particulier pour notre laboratoire car il est à la fois muté dans le syndrome d'Aicardi-Goutières (SAG) et connu comme étant un facteur de restriction du VIH-1 dans les cellules dendritiques (CD) humaines. De manière intéressante, on observe dans les deux cas une augmentation de la sécrétion d'IFN de type I.
  • Les approches à cellule unique devraient nous permettre de mieux caractériser le type de sous-cellule responsable d'un excès de production d'IFN et en utilisant d’Inférence des réseaux, nous devrions identifier les voies responsables de l'induction d'IFN en l'absence de toute infection pathogène.

 

Projet 2 : Interactions entre les cellules dendritiques humaines et le VIH-1

1) Détection du VIH-1 et amorçage d'une réponse immunitaire adaptative.

Un capteur cellulaire intrinsèque pour le VIH-1, le cGAS, a le potentiel d'activer la réponse de l'interféron de type I pour actionner la transcription inverse de l'ARN viral dans les CD, mais n'est généralement pas activé suite à un défaut d’hydrolyse des dNTP par SAMHD1. Il a été constaté que le VIH-1 infecte les CD, si les cellules sont d'abord exposées à des particules de type viral (VLP) qui délivrent la protéine Vpx (absente dans le VIH-1 mais codée par le VIS et le VIH-2). En favorisant la dégradation de SAMHD1, Vpx permet la réplication du VIH dans les CD, la détection par le cGAS et la production ultérieure d'IFN de type I.

Pour caractériser le réseau de régulation qui contrôle les réponses transcriptionnelles de l'hôte au VIH-1, en collaboration avec des membres du laboratoire de Richard Bonneau à la fondation Simons et d'autres collègues, nous avons déduit un modèle computationnel dynamique qui décrit la régulation au niveau moléculaire des réponses transcriptionnelles après une infection par le VIH-1 dans les cellules dendritiques humaines. Nous avons utilisé la puissance des algorithmes de machine learning (Inferelator ref ) combinés avec les "Big data" (Whole transcriptomic (Bulk RNA-seq)) et la caractérisation des régions accessibles de la chromatine (ATAC-seq) pour mieux comprendre comment le VIH-1 est détecté par les cellules dendritiques humaines (CD) et comment cette détection par le système immunitaire inné conduit à la production d'IFN de type I, à la maturation des CD et à une éventuelle réponse immunitaire adaptative contre le virus. En intégrant la caractérisation des régions accessibles de la chromatine à la cinétique d'expression, nous en déduisons un réseau de régulation des gènes qui relie 542 facteurs de transcription à 21 862 gènes cibles. Nous avons observé qu'une réponse à l'interféron est nécessaire, mais insuffisante pour entraîner la maturation de la CD. Parmi les facteurs de transcription inattendus dont on prévoit qu'ils joueront un rôle pendant la maturation de la DC, nous avons mise au jour le rôle du récepteur d'acide rétinoïque alpha (RARA), qui agit comme un répresseur transcriptionnel de la maturation des DC. Nous avons également identifié des agonistes médicamenteux du RARA qui potentialisent l'activation des CD en réponse à l'infection par le VIH.

Ce réseau montre comment la réponse innée dépend de l'action coordonnée de plusieurs facteurs de transcription et fournit une ressource pour étudier les principales voies qui régulent la réplication du VIH et de l'immunité innée.

Objectifs majeurs :

  • Grâce à cette modélisation dynamique de l'interaction entre les gènes et les facteurs de transcription, nous disposons maintenant d'un outil formidable pour générer de nouvelles hypothèses qui devront ensuite être validées expérimentalement pour mieux comprendre la réplication du VIH, la détection, la production d'IFN de type I et la maturation des cellules dendritiques en réponse à l'infection par le VIH.

 

2) Mécanismes moléculaires conduisant au transfert du VIH-1 des DC aux cellules T

Les CD expriment des récepteurs à leur surface faciliatnt l'entrée du VIH-1 mais sont relativement résistants à sa réplication virale. Elles capturent cependant le virus et le transfèrent à des cellules T-helper co-cultivées, sans qu’elles aient été infectées au préalable, dans un processus appelé "trans-infection". En tirant parti de ce mécanisme de transfert des cellules DC aux cellules T, le virus pourrait échapper, au moins en partie, à la première ligne de défense du système immunitaire dans les tissus muqueux et ainsi établir et amplifier l'infection des cellules T CD4+ dans les ganglions lymphatiques, avec une détection minimale par le système immunitaire.

Pour mieux comprendre ce processus biologique cellulaire, nous avons réalisé un criblage de l'ARNsh dans des cellules dendritiques primaires dérivées de monocytes humains (MDDC) afin d’éteindre individuellement près de 500 gènes impliqués dans le trafic membranaire et vésiculaire et de comparer leur efficacité au niveau du transfert du VIH-1. Nous avons ainsi identifié plusieurs gènes et voies, parmi lesquels TSPAN7 et DNM2. Ces deux protéines contrôlent la nucléation et la stabilisation de l'actine, un processus nécessaire pour maintenir le VIH-1 sur les dendrites riches en actine afin d’assurer son transfert vers les cellules T CD4+. En plus de ces deux molécules, ces travaux ont montré le rôle clé joué par la nucléation d'actine dans les cellules dendritiques pour limiter l'internalisation du VIH-1 et la formation de protubérances membranaires. Nous avons également découvert, comme cela a été rapporté dans d'autres systèmes biologiques, par exemple le cône de croissance neuronale, que dans les MDDC, des forces opposées contrôlent la formation et le passage rapide entre les dendrites riches en actine (actionnée par la nucléation d'actine) et les blebs (actionnée par la contraction d'actomyosine).

 

Objectifs majeurs :

-> Le VIH-1 comme modèle d'étude pour le transfert de pathogènes des CD aux lymphocytes T

  • Meilleure compréhension des mécanismes moléculaires reliant la nucléation/stabilisation de l’actine, la formation des dendrites et le contrôle des mécanismes d’endocytose.
  • Identification d'autres mécanismes de transfert du VIH-1. Dans notre criblage de shRNA, 84 hits semblent n’avoir aucun lien direct avec la nucléation d'actine, les protubérances membranaires et la régulation positive de l'endocytose.
  • Étude de la pertinence physiologique des mécanismes identifiés pour le transfert du VIH-1, de leur impact sur d'autres fonctions cellulaires clés et des applications potentielles à d'autres agents pathogènes.

 

 

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